mercredi 27 mai 2009

Sélection Officielle, Compétition : Looking for Eric, Ken Loach (2009)

L'on savait déjà depuis longtemps que Loach était féru de ballon rond. Cantona, visiblement, le savait aussi. C'est donc tout naturellement vers celui-ci que se tourne le footballeur/acteur quand il tient un scénario. Loach est séduit. Et trois ans après sa Palme pour le Vent se Lève, il revient à Cannes en grande pompe pour présenter, au milieu d'une sélection 2009 particulièrement sombre, un tendre OVNI footballistique : Looking for Eric.

Si l'on pourrait facilement reprocher au script de Cantona des allures d'égocentrisme forcené, on ne peut en revanche pas faire l'impasse sur son côté intriguant. L'histoire est simple : Eric est un facteur anglais, errant entre ses ex-femmes, leurs enfants déjà grands dont il est toujours, malgré les séparations, en charge, et son premier amour qu'il ne peut oublier. Mais au milieu de ce petit monde qui peuple son coeur deux fois plus gros qu'une maison, une place de choix est réservée à son idole : Eric Cantona. Il est donc tout naturel que ce soit son homonyme aux pieds d'or qui lui apparaisse pour l'aider à régler tous ses problèmes.

Conte de fée moderne, Looking for Eric n'en est pas moins un film intelligent et fin. Sous des dehors manichéens et simplistes, c'est bel et bien la trame d'un trame d'un drame social efficace qui se dessine. Cependant, le traitement de l'histoire l'empêche de sombrer dans le sordide et en fait un film fort et léger à la fois. S'inscrivant donc dans la logique de l'oeuvre de Loach, le film flirte avec le thriller, le drame et la comédie à l'anglaise, sans jamais vraiment choisir son camp.

Et malgré le thème, très axé "relations humaines" et "psychologie", n'exclue pas quelques scènes d'action, morceaux de bravoure dans la mise en scène et d'ores et déjà anthologiques. Le tout traité avec sobriété, et un humour burlesque, facile mais toujours efficace derrière ses gros rouages. Savant mélange, donc, de poésie moralisatrice et d'action, le tout teinté d'une tendre dérision : Loach et Cantona ont trouvé dans leur justesse de ton harmonieuse un point commun plus productif que le football.

Porté l'interprétation magistrale de Steve Evets et ponctué par les savoureuses répliques d'un Cantona placide et moralisateur à souhait, mais plein d'autodérision, le film se permet une facture académique, mais parfaitement maîtrisée. Le réalisateur n'ayant plus rien à prouver, il s'efface derrière son admirable casting, son scénario bien ficelé, le rythme effréné de son intrigue, son excellente bande-son (Blue Suede Shoes en tête) et ses foisonnantes répliques cultes.

Et si l'on peut toutefois reprocher à l'histoire de souvent dérouler de grosses ficelles, et de jouer constamment sur l'identification et l'attachement que procure chacun des personnages, le film sait garder l'optimisme et la fraîcheur sans tomber dans la mièvrerie. L'exercice de style était risqué, mais le duo Loach/Cantona frappe un grand coup. Et s'ils repartent de Cannes sans récompense, nul doute qu'ils ont su marquer les esprits. En bien.

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