dimanche 24 mai 2009

ACID : Avant-Poste, Emmanuel Parraud (2009)

(Les Laboratoires Javel entrent ici dans une période qui risque d'être fastueuse : le genre qui rime avec "Festival de Cannes", voyez. Vous voilà prévenus.)

L'Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion, plus connue sous le sigle d'ACID, présente à Cannes depuis 15 ans une sélection de films indépendants, de différentes nationalités. De Finkiel à Ameur-Zaïmeche en passant par Le Perron, l'ACID soutient, révèle et aide la production artistique cinématographique en marge.

Parmi les choix des sélectionneurs ACID se trouvait cette année le premier film d'Emmanuel Parraud, Avant-Poste. Cédant à la veine prolifique du drame social, il croque l'histoire d'un animateur de banlieue qui va, malgré sa relation conflictuelle avec lui, tout mettre en oeuvre pour aider un jeune homme rêvant de devenir puéricultrice (le masculin n'existe pas, et non). Cependant, tout le monde n'est pas Abdellatif Kechiche, et un synopsis engagé ne suffit pas au premier venu à faire un bon film.

Le scénario de base, s'il peut paraître intéressant sur trois lignes, souffre sur une heure et demie de problèmes de construction, et d'un manque d'originalité qui le fait s'essouffler rapidement. Rien ne tient vraiment en haleine dans cette fresque flirtant avec l'autobiographie, qui prend le parti de se centrer sur le personnage de l'animateur en suivant l'expérience personnelle de Parraud. Mais s'il évite l'écueil d'un film-journal-intime en restant en retrait par rapport à son personnage, il perd en justesse et en force ce qu'il gagne (plus ou moins) en objectivité.

Le film entier se construit à travers les yeux de cet animateur, dont l'histoire (à vocation) tragique noie progressivement dans la confusion la plus totale. Ce personnage, qui porte presque à lui tout seul le film entier, et dont la complexité et l'évolution se revendiquent l'essence du scénario, est malheureusement soutenu par Airy Routier, un acteur peu convaincu, et par là-même particulièrement peu convaincant. Le film, par ce simple état de fait, perd sa crédibilité dramatique et devient une tranche de vie oscillant entre le sordide et l'inintéressant.

On doit tout de même reconnaître chez Parraud une certaine prise de risque dans la réalisation. L'ouverture, plan en légère contre-plongée sur des douches de piscine allumées, et importance du hors-champs par une utilisation intelligente du son, laissait présager le meilleur. Mais, dans sa volonté très illustrative de présenter un personnage confus, le réalisateur se perd dans une indémélable construction à tiroirs qui sabote la bonne compréhension de l'histoire. Ainsi, on ne sait pas où se passe l'action, on ne comprend pas les transitions, ni même le sens de certaines scènes (la séquence de la plage !).

Au jeu dangereux du film engagé, Parraud souffre de vouloir trop en montrer, et à celui du premier film, de vouloir trop en faire. Pêchant par excès et par passion, il livre au final une ébauche, un embrouillamini qui ne captive pas le spectateur, et qui, trop complexe et saccadé, ne donne pas vraiment envie de se poser de questions. Un coup dans l'eau.

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