Dans le cadre de la rétrospective 'Dennis Hopper et le Nouvel Hollywood' à la Cinémathèque Française, j'ai eu la chance d'assister (malgré de nombreuses péripéties que je n'étalerai pas ici parce que c'est pas le but et que ceux qui sont susceptibles d'être intéressés savent déjà tout, ahah.) à la Leçon de cinéma de Dennis Hopper.
Donc, petit rappel au cas où. Dennis Hopper est ce qu'on appelle un "artiste touche-à-tout" : à la fois acteur, réalisateur, peintre, photographe et collectionneur, il est emblématique de la Contre-Culture américaine. Parmi les chefs d'oeuvre que compte sa filmographie, je ne citerai que la Fureur de Vivre (de Nicholas Ray, avec James Dean, en 1955), Easy Rider (son premier film, avec Peter Fonda, en 1969), Apocalypse Now (de Francis Ford Coppola, avec Marlon Brando -entres autres- en 1979), Blue Velvet (de David Lynch, avec Isabella Rossellini, en 1986), et tant d'autres films qui ont profondément marqué l'histoire du cinéma. A ce titre (ces titres, ahah !) je crois qu'il n'est pas excessif de dire que nous avons affaire à un des personnages majeurs du cinéma de la seconde moitié du XX° siècle (et si on se centre uniquement sur les USA, là, mon vieux, ça ne fait plus le moindre doute). Rien que ça.
Et pour le coup, le nom de "leçon de cinéma" était foutrement bien adapté. En deux heures, Hopper nous a purement et simplement 'appris son cinéma'. Appris à le regarder, à la voir un peu avec ses yeux, certes, mais aussi appris son histoire, et la genèse de cet Hollywood pris au piège de la Contre-Culture.
Et on se prend au jeu, d'Easy Rider à Apocalypse Now, de l'envie de s'évader au besoin de retourner vers un 'centre' symbolique, on suit Hopper, enthousiaste et communicatif (sans doute un peu trop au goût de son interprète, d'ailleurs...), qui nous raconte "son" cinéma.
Après un extrait du générique d'Easy Rider, le désormais cultissime 'Born to be Wild' de Steppenwolf, le cinéaste nous parle du rapport à la musique dans ses films. Parce que dans ER, la narration naît bien plus de la musique que de l'image en elle-même. A l'époque, Hopper est révolutionnaire : la bande-originale de son film n'est pas réalisée pour le film, par un seul et unique compositeur, comme c'était l'habitude. L'équipe du film est simplement allée trouver les artistes qui jouaient les morceaux qui les intéressaient et leur demander l'autorisation (ce qui revenait du coup très peu cher !). Ainsi, ils sont profondément ancrés dans le film et collent à merveille à chaque endroit où ils interviennent. Et un mot sur l'aventure des castings du road-movie, réalisés sur place par le directeur de casting qui partait toujours en avance du reste de l'équipe. Directeur de casting dont les choix d'acteurs semi-professionnels de théâtre débectaient souvent Hopper. Parce qu'en effet, contrairement à ce qui se fait beaucoup (dans le cinéma français, pour ne citer que lui), il préfère le brut de décoffrage, l'Humain avec un grand H, celui qu'on trouve dans le lieu du tournage, occupé à faire ce qu'on voudrait qu'il fasse devant notre caméra.
Deux ans après, en 1971, Hopper réalise The Last Movie, l'histoire d'un acteur qui reste sur un plateau de tournage déserté. Le scénario sonne comme très pessimiste sur l'avenir du cinéma, et le film a rencontré quelques difficultés à sortir. Cependant, ce deuxième film est très important dans la carrière de Hopper. Il correspond en effet à son premier film écrit, et propose une réponse à un questionnement réel du cinéaste : que deviennent après le départ d'une équipe de tournage les lieux bouleversés par l'implantation des décors ?
Ensuite, avec un extrait de Tracks (de Henry Jaglom en 1976), Hopper développe sa face "acteur", jusque là un peu mise de côté. Il nous raconte ses années de formation, et comment un tiers des élèves échouait et un autre tiers séjournait régulièrement en hôpital psychiatrique. Mais pour notre plus grand plaisir (et enrichissement personnel), Hopper fait partie du tiers qui a survécu, et brillamment réussi pour pouvoir aujourd'hui nous enseigner cette méthode de la mémoire émotionnelle, méthode qui soit-dit-en passant peut sembler couler de source mais qu'il a très bien su exprimer et faire comprendre (à moi, en tout cas, ce qui est déjà plutôt respectable).
Alors les enfants, on se relaxe. Parce que c'est la clef, être détendu, frais et dispos. Et rappeler à soi le souvenir d'une émotion particulièrement, à travers ses cinq sens. Le but est de retrouver les sensations physiques que l'on ressentait lorsqu'on a été traversé par l'émotion en question, pour la faire revivre "matériellement". Et avant d'entrer au plateau, il faut "ranger" ce ressenti dans sa mémoire, pour pouvoir y faire appel en retrouvant ces sensations physiques. Ainsi, on peut jouer une scène où on rigole, toussa, et brusquement pouvoir se mettre à pleurer quand notre personnage apprend la mort de son père (pour reprendre l'exemple cité par Hopper). Bon, sur Internet, difficile de vous faire une démonstration comme nous en avons eu, mais en tout cas, je vous garantis que ça marche très bien -en tout cas, avec lui, c'est saisissant-.
Et pour finir, quelques mots sur Apocalypse Now, et Marlon Brando. Parce qu'en effet, tous ces acteurs mythiques que réunit Coppola n'avaient-ils pas ce même désir, au delà de rejoindre le Colonel Kurtz, de rejoindre Marlon Brando, osons le dire, le plus brillant acteur de sa génération, et l'icône éternelle de l'acteur américain, qui à par la qualité de son jeu et de ses méthodes influencé tout un large pan du cinéma ?
Dennis Hopper répond oui.
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